Regroupe trois villages: GIGEAN, POUSSAN et MONTBAZIN
Père Bogdan LESKO, curé.

ANNONCES DU 21 AU 29 SEPTEMBRE 2024

(Historique de l'agenda)

 183. Sg 1,13-15 ; 2,23-24, XIII Dimanche du Temps ordinaire, B, Réflexion 2024

Sœurs et Frères

    Comme dimanche dernier, nous commentons à nouveau en première lecture, un livre dit « sapiential ». Notre texte est tiré du livre de la Sagesse qu’on appelle aussi, par tradition, la « Sagesse de Salomon ». Salomon ne pouvait évidemment pas en être l’auteur, même si ce personnage apparaît souvent dans le récit (cf. chapitres Sg 6,22-9). Il est important de savoir que ce livre (contrairement à celui de Job) ne figure ni dans la Bible hébraïque, ni comme canonique dans l’Ancien Testament de tradition protestante. Pourquoi ? Parce qu’il a été rédigé en grec. L’auteur de ce livre est anonyme, mais c’est un érudit qui connaissait bien la culture grecque. Il avait pour but de transmettre la vitalité de la religion juive à ses compatriotes qui vivaient dans un contexte hellénistique, afin qu’ils restent fidèles à la foi de leurs ancêtres. Pour nous les catholiques, et majoritairement pour les Églises orthodoxes, c’est un livre sacré, inspiré par l’Esprit de Dieu. Quoi qu’il en soit, il contient un message destiné à tous. Qui sait si, parmi les lecteurs de cette modeste réflexion, ne se trouve pas un juif ou un protestant ? – clin d’œil avec sourire.

    Il faut savoir aussi que ce livre est considéré comme le plus « jeune » de l’Ancien Testament (Ier siècle av. J.-C.). La partie que nous avons à méditer montre bien qu’il est destiné à des Juifs vivant au contact de la culture grecque : on n’y trouve pas le mot « résurrection » mais le mot « immortalité », plus compréhensible pour eux. Notre texte laisse aussi penser que l’auteur était juif car il connaît aussi bien la langue et la culture grecque que sa propre religion. Ainsi les versets 23-24 du chapitre 2 renvoient au livre de la Genèse (cf. Gn 1,26-27). Je vous les cite car ils m’intriguent : « Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité, il a fait de lui une image de sa propre identité. C’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde ; ils en font l’expérience, ceux qui prennent parti pour lui. (Sg 2,23-24) » On pourrait s’interroger : de quelle ‘incorruptibilité’, de quelle ‘image’ et de quelle ‘identité’ de Dieu s’agit-il ? Que signifie « la mort est entrée dans le monde par la jalousie du diable » ? Et enfin de quelle mort est-il question » ?


   J’essaierai de répondre brièvement parce que le sujet, d’un point de vue théologique, est très vaste, et je commencerai par la dernière phrase, c’est à dire le verset 24. On constate à la lecture que, dans ce verset, la mort n’est pas évoquée en termes de fin de vie biologique. Nous savons tous que tous les hommes - bons ou méchants, justes ou pas, mourront un jour. Et donc, la « mort que le diable a fait entrer dans le monde » est la mort spirituelle avec sa conséquence, la mort physique » (cf. Sg 1,13n ; Rm 5,12n)¹.
    Que signifie à présent l’affirmation suivante : Dieu a fait de chacun et chacune de nous « une image de sa propre identité »² ? Le catéchisme de notre Église catholique nous donne une réponse très condensée : « L’homme est créé à l’image de Dieu en ce sens qu’il est capable de connaître et d’aimer librement son créateur. Sur la terre, il est la seule créature que Dieu a voulu pour elle-même et qu’il a appelée à participer à sa vie divine, par la connaissance et par l’amour. Parce qu’il est créé à l’image de Dieu, l’homme a la dignité d’une personne ; il n’est pas quelque chose, mais quelqu’un, capable de se connaître, de se donner librement et d’entrer en communion avec Dieu et avec autrui »³.
    Autrement dit, Dieu partage avec nous sa nature, que nous pouvons caractériser notamment par les mots : liberté, amour, relation et communion. Ce que nous devons faire, c’est seulement « alimenter » notre existence si fragile, à son Esprit. Et cela jour après jour, pour que puisse vivre en nous-mêmes l’image de Dieu. Voilà « tout » ce que Dieu « attend de nous en retour » pour que, dans la mortalité de notre corps, nous puissions « toucher » à l’« incorruptibilité » de notre existence. Donc, ce qui est le plus dangereux pour nous, ce n’est pas la mort biologique, c’est la mort spirituelle - être séparés de Dieu.
    Et même si quelqu’un ne croit pas en Dieu, que deviendra-t-il s’il n’est pas animé du désir d’explorer sa propre existence, du désir de vivre en harmonie avec lui-même et avec autrui ? Ne risquera-t-il pas une sorte de mort spirituelle ?

    Dans notre société, nous constatons une tendance à vouloir éterniser tous les moments de la vie : par des photos, par des commémorations et autres cérémonies du souvenir... De même, le « bizness » des produits de soin en tous genres, n’a pas d’autre but que de rendre notre corps toujours plus « incorruptible » en quelque sorte. Et cela, en sachant bien que tous, nous mourrons un jour.

   En revanche, nous les chrétiens, ce que nous devons garder « incorruptible », c’est notre relation avec Dieu parce que, dans notre âme immortelle, nous portons l’image de Dieu. Dieu, qui nous donne Son identité afin que nous puissions vivre pleinement notre humanité, sans être entravés par la fragilité de ce qui est en nous corruptible. Et comme Dieu, nous sommes invités à donner à l’autre ce qui nous est propre : notre identité, ce qui nous fait vivre. C’est le meilleur cadeau que nous pouvons lui offrir.

***
« Ô Seigneur, notre Dieu, qu’il est grand ton nom par toute la terre ! Jusqu’aux cieux, ta splendeur est chantée par la bouche des enfants, des tout-petits : rempart que tu opposes à l’adversaire, où l’ennemi se brise en sa révolte. A voir ton ciel, ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas, qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur » (Ps 8, 2-6).

Bon Dimanche à chacune et chacun de vous,
Votre frère, Bogdan

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¹«‘Diable’ traduit, dans les LXX {La Septante, latin : Septuaginta – la traduction grecque de la Bible hébraïque}, l’hébreu satan, cf. Jb 1,6n. L’auteur interprète ici Gn 3, cf. Jn 8,44 ; 1Jn 3,8 ; Ap 12,9; 20,2. La mort que le diable a fait entrer dans le monde est la mort spirituelle, avec sa conséquence la mort physique, cf. Sg 1,13n ; Rm 5,12n ». Selon la note pour Sg 2,24 de la Bible Jérusalem, édition du Cerf 2000.
²« D’après le contexte, ce que Dieu possède en propre, ce doit être l’éternité ; divers manuscrits portent précisément ce mot » - selon la note de la TOB pour Sg 2,23 - Traduction œcuménique de la Bible, édition Cerf 2012. À savoir que la note de la Bible de Jérusalem ajoute : Littéralement on pourrait traduire aussi : « ‘de sa propre propriété’ ; variante : ‘de sa propre éternité’ ou : ‘de sa propre ressemblance’ ». Voir la note pour Sg 2,23 de la Bible Jérusalem, édition du Cerf 2000.
³https://www.vatican.va/archive/compendium_ccc/documents/archive_2005_compendium-ccc_fr.html. Voir aussi Catéchisme de l'Église Catholique ; CCC 355-357.