Regroupe trois villages: GIGEAN, POUSSAN et MONTBAZIN
Père Bogdan LESKO, curé.

ANNONCES DU 21 AU 29 SEPTEMBRE 2024

(Historique de l'agenda)

 158. Is 40, 1-5.9-11, II Dimanche de l’Avent, B, Réflexion 2023

Sœurs et Frères

     Ce deuxième dimanche de l’Avent nous donne encore à lire un extrait du prophète Isaïe, situé cette fois dans le « Deutéro-Isaïe », autrement dit dans cette partie du livre appelée le « Second Isaïe » (chapitres 40-55). Et cette deuxième section, dont nous commentons le début, est intitulée « le livre de la consolation d’Israël ». Pourquoi ? Parce que ses premiers mots sont : « Consolez (traduit aussi par « réconfortez »), consolez mon peuple, – dit votre Dieu – parlez au cœur de Jérusalem ». La « consolation » est en effet « le thème principal de ces chapitres, en contraste avec les oracles généralement menaçants des chapitres 1-39 »¹. L’auteur anonyme de cette partie du livre est alors exilé avec ses compatriotes à Babylone (VIe siècle av. J.-C.) - chez les païens donc - et il leur annonce la libération de la servitude babylonienne et le retour à Jérusalem. Il annonce au peuple que « son service est accompli, que son crime est expié, qu’[il] a reçu de la main du Seigneur le double pour toutes ses fautes ». Autrement dit, « Jérusalem (‘ Jérusalem’ désigne ici les Israélites en exil) a été astreinte au ‘service’ d’un mercenaire ou d’un esclave [et] elle a payé sa faute au double, comme un voleur (cf. Ex 22,6) »² . Bien évidemment, Dieu ne voulait pas se venger de son peuple puisqu’il avait jadis conclu avec lui une Alliance d’amour. Ce « payement au double de leur faute » signifiait plutôt que ce peuple savait déjà suffisamment ce qu’il en coûtait d’être infidèle à Dieu et à ses lois, d’être injuste envers son prochain.

    Dans notre texte, il y a aussi ces mots : « Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur ; tracez droit, dans les terres arides, une route pour notre Dieu » (verset 3). Quand nous lisons cette phrase, nous les chrétiens, nous trouvons facilement le lien avec l’évangile d’aujourd’hui, parce que « le Nouveau Testament cite ce verset pour situer le ministère de Jean-Baptiste (cf. Mc 1,2-3 ; Mt 3,3 ; Lc 3,4-6 ; Jn 1,23) »³. Toutefois à cette époque, la phrase suggérait des réalités très concrètes pour ceux qui se trouvaient exilés en Mésopotamie. En effet, « des textes babyloniens parlent en termes analogues de voies processionnelles ou triomphales préparées pour le dieu ou pour le roi victorieux ». Il s’agissait sans doute du roi victorieux de Babylone et des dieux païens, notamment le dieu Morduk. Quant aux voies préparées pour les processions, les exilés étaient forcés de les faire. C’est dans ce contexte que le prophète Isaïe annonce la libération du peuple élu, annonce « un nouvel Exode » à travers le désert⁴. Ainsi, « la gloire du Seigneur sera dévoilée et tout être de chair verra que la bouche du Seigneur a parlé » (verset 5).

    Peut-être qu’à présent, quelqu’un d’un peu impatient (clin d’œil), me dira : « Bogdan, franchement, pourriez-vous me dire à quoi servent toutes ces remarques exégétiques et historiques ? » « J’ai compris, avançons ! » – sourire.

Si j’ai fait ces remarques, c’est parce que cette première lecture parle du cheminement de chacune et chacun de nous ; et même de celui des non croyants. Ne soyons pas dupes : malgré la promesse de la délivrance, de nombreux Israélites ne voulaient pas quitter Babylone où ils s’étaient bien implantés et avaient reconstruit leur vie. Pour eux, ce n’était pas évident de se lancer dans un long voyage vers une avenir incertain, d’autant plus que le Temple avait été détruit (pourquoi aller à Rome si la Basilique Saint Pierre est détruite et si le Pape n’est pas là ?). Ils étaient nombreux à s’être habitués à vivre dans un pays étranger, et ils ne voyaient pas vraiment pour quelles « raisons » ils se détourneraient d’un avenir assuré.

    Nous, les femmes et les hommes d’aujourd’hui, nous cherchons également la stabilité et la sécurité. Et parfois, il nous est difficile de prendre le risque d’« abandonner » la sûreté pour ce qui est incertain : « Le Christ va venir, je le crois. Mais, me préparer à Noël, est-ce que cela va changer vraiment quelque chose dans ma vie ?

Se lancer sur la route dans l’« inconnu », ne consiste pas à calculer le pour et le contre. C’est toujours l’affaire d’un cœur qui désire et espère - sans désemparer - la paix, la bonté et la beauté qui surpassent toutes les choses de ce monde. Il m’arrive de rencontrer des personnes qui souffrent mais qui ne « bougent » pas trop pour changer leur destin ; pour elles, c’est « moins coûteux » de rester avec une souffrance familière, que de se mettre en route vers la liberté.

Pourtant dans notre société, nous voyons des gens prendre des décisions radicales, choisir de cheminer vers une autre rive. Ils quittent par exemple un travail bien payé, un logement confortable pour réaliser un autre but qui les fera vivre réellement. Et nous les chrétiens, est-ce que nous croyons vraiment que nous sommes « l’argile » dans les mains de Dieu ? Dieu qui nous façonne avec son Amour (cf. Is 64,7).

Bon Dimanche à vous tous, votre frère Bogdan

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¹Selon la note de la Bible de Jérusalem pour le Is 40,1, édition du Cerf 2000.

²Selon la note de la Bible de Jérusalem pour le Is 40,2, édition du Cerf 2000.

³voir la note pour Is 40,3 de la TOB - Traduction œcuménique de la Bible, édition Cerf 2012.

⁴« Déjà Is 10,25-27 avait rappelé les prodiges de l’Exode comme gage de la protection divine. Les prophètes de l’Exil amplifient ce thème. Comme jadis, Dieu va venir sauver son peuple, Jr 16,14-15 ; 31,2 ; Is 46,3-4 et 63,9 (qui reprennent Ex 19, 4). Le premier Exode, avec ses prodiges, Mi 7,14-15, le passage de la mer Rouge, Is 11,15-16+ ; 43,16-21 ; 51,10 ; 63,11-13, l’eau miraculeuse, 48, 21, la nuée lumineuse, 52,12, cf. 4,5-6, la marche au désert, ici w. 3s, cf. Ba 5,7-9, devient à la fois le type et le gage du nouvel Exode, de Babylone à Jérusalem ». Cf. la note de la Bible de Jérusalem pour le Is 40,3, édition du Cerf 2000.