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Père Bogdan LESKO, curé. ANNONCES DU 21 AU 29 SEPTEMBRE 2024(Historique de l'agenda) |
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139. Mt 10, 26-33, XII Dimanche du Temps Ordinaire, A, Réflexion 2023
Sœurs et Frères
Comme vous pouvez le constater vous-mêmes, nous nous trouvons encore aujourd’hui dans le « discours missionnaire » du Christ. Et comme je vous l’ai déjà signalé dimanche dernier, il est bon de considérer l’extrait d’un texte dans un contexte plus large afin de le mieux comprendre. Pourquoi, cette fois-ci, est-ce aussi important ? Parce qu’après l’envoi en mission des apôtres, munis de l’autorité sur les esprits impurs et du pouvoir de guérir toute maladie ou infirmité (voir dimanche dernier), le Christ leur annonce des persécutions. Et cette annonce précède directement notre récit où Jésus rappelle à ses messagers qu’ils n’ont rien à craindre ! Sauf une chose.
Aujourd’hui je me suis dit : « Bogdan tu ne vas pas te faciliter la tâche et tu dois aborder une phrase de l’évangile qui t’intrigue mais dont l’explication prendra du temps ». J’espère que L’Esprit de Dieu est de mon côté ; donc, je me lance pour bousculer l’esprit et le cœur de mes lecteurs – sourire.
Le Christ dit à ses disciples ceci : « Ne craignez pas ceux qui tuent le corps sans pouvoir tuer l’âme ; craignez plutôt celui qui peut faire périr dans la géhenne l’âme aussi bien que le corps ». Ces mots peuvent nous paraître effrayants. D’autant plus qu’une autre traduction ne nous laisse vraiment aucun doute : « Ne frémissez pas des tueurs du corps qui ne peuvent tuer l’être, mais frémissez de qui peut perdre et corps et être dans la Géhenne »¹. Cette traduction d’André Chouraqui souligne là que l’âme ne doit pas être perçue comme quelque chose « à part » de nous-mêmes, parce que l’âme c’est notre « être ». Cette phrase est vraiment forte, quelle que soit sa traduction.
Et pour mieux comprendre de quoi nous parle Matthieu, je commence par une note de la TOB qui nous donne, pour le mot « âme », cet éclairage : « Alors que le mot psyché équivaut souvent à « vie » (Mt 10,39 ; 16,25-26), Matthieu distingue ici le corps et l’âme (Luc 12,4-5 ne parle que du corps). Il n’identifie pas âme et vie, car il devrait distinguer deux sortes de vie, ce qu’il ne fait nulle part. Le corps est ce par quoi l’homme s’exprime, l’âme est le principe qui maintient en relation avec le Dieu de la vie »². Et dans le Catéchisme de notre Église Catholique nous pouvons aussi trouver quelques indications pour mieux comprendre ce qu’est l’âme dans l’homme - « Souvent, le terme “âme” désigne dans l’Écriture Sainte la vie humaine (cf. Mt 16, 25-26 ; Jn 15, 13) ou toute la personne humaine (cf. Ac 2, 41). Mais il désigne aussi ce qu’il y a de plus intime en l’homme (cf. Mt 26, 38 ; Jn 12, 27) et de plus grande valeur en lui (cf. Mt 10, 28 ; 2 M 6, 30), ce par quoi il est plus particulièrement image de Dieu : “âme” signifie le principe spirituel en l’homme »³.
Cependant quelqu’un pourrait me dire ceci : « Je comprends qu’on puisse tuer le corps, en tirant sur quelqu’un avec un pistolet par exemple. Mais tuer une “âme” qui n’est pas visible, cela me parait impossible ! Et pourquoi cet avertissement de craindre « plutôt celui qui peut faire périr dans la géhenne l’âme aussi bien que le corps » ? La question est bien ciblée (sourire). D’abord je vous explique le mot « géhenne » qui n’est pas courant aujourd’hui, mais qui pour les Juifs avait une référence très concrète. Ce mot évoquait la vallée de Ge-Hinnom - un endroit terrifiant à l’extérieur des murs de Jérusalem, où à l’époque des rois de Juda, des holocaustes d’enfants vivants étaient offerts à Moloch, dieu des Ammonites (cf. 2 R 16,3 ; 23,10 ; Jr 7,31 ; 19,1-13). Dans la même vallée, au temps de Jésus, il y avait une décharge publique où régnait une éternelle puanteur et où un feu brûlait constamment. C’était donc un lieu associé à quelque chose de terrible et d’irréversible à la fois.
Nous, les chrétiens nous le savons bien, nous n’avons pas la possibilité de protéger absolument notre corps, parce que le risque « zéro » n’existe pas. Nous partageons cette condition avec tous les hommes. Quelqu’un peut nous tuer involontairement, par exemple dans un accident. Et de toutes façons nous le savons, nous ne pouvons pas arrêter le temps ; nous pouvons même dire qu’en vieillissant nous voyons notre propre corps « mourir » un peu chaque jour.
Par contre, cela dépend de nous que notre âme soit vivante ; autrement dit, que le principe qui nous maintient en relation avec le Dieu de la vie soit vivant. Et Jésus Lui-même devait toujours veiller à ce que son âme, à ce que le principe de la relation avec son Père, ne soit pas « abîmé » ou, je dirais, « rompu » et « abandonné ». Nous nous souvenons qu’aussitôt après son baptême, Il fut conduit par l’Esprit Saint au désert et tenté par le diable. Et Il refusa toutes les tentations, pour que son âme, pour que ce lieu de la rencontre avec son Père ne soit pas « touché » (cf. Mt 4,1-11). De toute évidence Jésus fut aussi tenté par les gens qui l’entouraient : les scribes et les pharisiens, dans leurs nombreux échanges (voir par exemple : Mt 16,1 ; 19,3 ; 22,18.35) ; ses disciples (Pierre – Mt 16,21-23) et même sa propre famille qui L’a traité de fou (Mc 3,21; 3,31–35; Jn 7,3–8). Élevé par ses parents dans la religion de son peuple, Jésus a cherché à comprendre ce qui se passait dans son âme (cf. Lc 2, 41-47). Et souvent pendant sa mission, malgré la fatigue de la journée, malgré tout, Jésus prenait soin de ce « principe » – cet espace pour la rencontre avec son Dieu dans l’intimité de son âme (par exemple : Mc 1,35 ; 6,46 ; Lc 3,12 : 22,39-42).
Nous ne pouvons pas abandonner notre propre « principe spirituel » animé par l’Esprit de Dieu. Là où Dieu nous parle et où Il nous forge dans son amour infini. Parce que si notre âme est morte, nous sommes déboussolés et nous nous éloignons facilement de la vraie vie qui vient de Dieu. Et quand notre âme est morte, notre corps meurt spirituellement (même si physiquement tout va bien) ; parce que notre corps est créé par Dieu pour exprimer avant tout l’amour que nous Lui portons et que nous portons à autrui par nos paroles et nos actes.
Et notre Église Catholique ne peut pas non plus s’éloigner, abandonner la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ qui est son âme et sa raison d’être. Sinon elle sera morte.
Bon Dimanche à vous tous et bon repos dans l’âme de chacun de vous,
votre frère Bogdan
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¹https://nachouraqui.tripod.com/id61.htm
²Selon la note de la TOB pour le verset Mt 10,28 – Traduction œcuménique de la Bible, édition Cerf 2012.
³Cf. Catéchisme de l’Eglise Catholique (CEC), n°363 - https://www.vatican.va/archive/FRA0013/
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