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La religion et nos règles de vie communes. Gaston Pietri, La Croix, le 04.03.2021

Tribune Gaston Pietri. Prêtre du diocèse d’Ajaccio. Examinant le projet de loi « confortant le respect des principes de la République », l’auteur recommande d’intégrer l’enjeu pédagogique dans la façon de s’adresser aux musulmans.
La Croix, le 04/03/2021 à 15:25
Lecture en 3 min.
La religion et nos règles de vie communes
Prier, dans toutes les religions

Dans les remarques et les objections aussi que suscite le projet de loi destiné à conforter les principes de la République, de toute évidence l’enjeu est principalement l’avenir d’une laïcité demeurée fidèle à ses fondements. Se greffe sur cet objectif essentiel la préoccupation d’une présence musulmane capable de concilier son attachement à l’Islam et des pratiques en tous points respectueuses de ce que nous appelons en France les « valeurs de la République ».

→ DOSSIER. L’islam, pourquoi c’est compliqué

Il est clair que notre laïcité n’est plus celle de pionniers, tel Ferdinand Buisson, qui voulaient sauvegarder au XIXe siècle l’idée de Dieu tout en cherchant à éradiquer l’emprise de l’Église catholique sur la société française. L’idée de Dieu, avec bien des nuances dans le monde actuel, demeure parmi les résidents musulmans majoritaire et soucieuse de visibilité. D’où il résulte l’une ou l’autre marque socialement repérable et pour certains dérangeante.

Un « Islam de France », selon une dénomination qui n’est pas unanimement acceptée, pourra-t-il soit renoncer à certaines marques soit les amender ? On sait que la scolarisation « à la maison » n’est pas en harmonie réelle avec l’esprit et la lettre de l’école unique et obligatoire.

→LIRE AUSSI. Un islam « français », difficile mais pas impossible

Mais, au-delà de ce point névralgique, il est bien d’autres questions, sur lesquelles de bons connaisseurs de l’Islam, rompus à l’interprétation du Coran, pourraient dans la situation actuelle exprimer des avis sérieusement argumentés. Car il est trop facile d’attribuer au Coran des pratiques qui, en certains cas, relèvent de traditions à coloration religieuse.

Le droit à la liberté religieuse
En ce qui concerne la mention de Dieu, ce sont avant tout les sensibilités qui divergent. Quant aux principes de la laïcité, à l’époque fondatrice, c’est en France même et donc dans le cadre de la République, que les « devoirs envers Dieu » prônés par quelques-uns ont été récusés par le Parlement, ne serait-ce que, selon l’expression de Jules Ferry, à cause de l’impossibilité de déterminer de quel Dieu il s’agirait.

→ PORTRAIT. Abdel Foiraison, l’humour au service de la pédagogie

L’un des textes, qui certes commence à dater, mais demeure une référence majeure pour notre époque, est la déclaration universelle des droits de l’homme adoptée par l’ONU en 1948. La leçon des totalitarismes du XXe siècle a entraîné la reconnaissance du droit à la liberté religieuse (article 18). Les musulmans ne sauraient la refuser en France, d’autant qu’à leur égard la reconnaissance de ce droit sur le sol français paraît aller de soi. Mais nous ne pouvons oublier qu’un bon nombre de pays, en 1948, ou bien étaient absents de l’ONU ou bien ne se sont pas reconnus dans cette charte et cela maintenant encore des pays de culture islamique.

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L’Église catholique a gardé longtemps le silence à tout le moins sur l’opportunité de ce texte. C’est en 1963 que, tout en avouant quelques réserves sans autre précision, l’encyclique « Pacem in terris » signée du Pape Jean XXIII, a reconnu cette déclaration comme « un pas vers l’établissement d’une organisation juridico-politique de la communauté mondiale » (n°144). La principale réserve était certainement l’absence de toute mention de Dieu pour un document d’une telle portée universelle, alors que les constitutions de certains pays authentiquement démocratiques maintenaient une référence. Parmi eux des pays européens.

Neutralité sur la mention de Dieu
L’omniprésence de cette mention, jusque dans le préambule des constitutions pour des pays de civilisation arabo-musulmane, devrait nous alerter sur la sensibilité d’une fraction au moins de nos concitoyens fidèles de l’Islam. Leur faire entendre qu’ici la laïcité réclame cette forme de neutralité est certes possible. Pourvu que ce soit sous l’angle du respect de tous, y compris de ceux qui se déclarent « sans religion ». Mais il y faut un souci pédagogique auquel nous ne pensons pas spontanément.

→ TRIBUNE. Respect des principes de la République : il faut aussi un volet éducatif
Nos visées, d’ordre politique, juridique, social, devraient intégrer cette exigence pédagogique. Tout en sachant que des interprètes qualifiés du Coran manifestent des évolutions notables en direction d’une plus grande ouverture aux requêtes de la raison, à l’esprit démocratique, à la pluralité des opinions sur l’application des règles élémentaires dans la vie courante. Y a-t-il des « non religieux » en pays d’Islam ? Mais là n’est pas directement la question dans les discussions pour le projet de loi en cours.